Thierry Jouan, agent de la DGSE, raconte sa mission durant le génocide des Tutsi au Rwanda

3/04/2013
Illustration: Thierry Jouan, agent de la DGSE, raconte sa mission durant le génocide des Tutsi au Rwanda
Thierry Jouan, agent de la DGSE, raconte sa mission durant le génocide des Tutsi au Rwanda
 3/04/2013

« Officier des Services secrets français, Thierry Jouan avait infiltré l’ONG Médecins du Monde pour informer jour après jour sa hiérarchie de la perpétration du génocide des Tutsi. Il initia l’opération d’exfiltration menée dans la grande ville de Butare par les militaires français de Turquoise », annonce Jean-François Dupaquier, sur Afrikarabia.

Il ajoute :

« C’est le témoignage qu’on n’espérait pas : la confession de la “sonnette” de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) - l’équivalent français de la CIA - pendant le génocide des Tutsi entre avril et juillet 1994 au Rwanda. Thierry Jouan - qui a quitté l’armée en 2006 avec le grade de colonel - a été durant treize ans un des agents du mystérieux “Service action” de la DGSE. Cet officier pesait lourd au sein des services secrets et avait son franc-parler. S’il finit par quitter la caserne du boulevard Mortier à Paris (siège de la DGSE familièrement appelée “La Piscine”), ce fut surtout parce qu’on lui refusait le commandement du camp de Cercottes, dans le Loiret, où sont formés les agents “Action” et les commandos du 11e Choc. Une promotion qu’il estimait méritée. Au vu des états de service de cet officier parachutiste bardé de médailles et citations, on peut comprendre son point de vue. Au moins l’inconséquence ou l’ingratitude de sa hiérarchie nous vaut-elle cette confession d’une plongée dans le génocide des Tutsi et le massacre des Hutu démocrates en 1994 au Rwanda. »

Ancien militaire, « il croit éviter d’énerver son ancienne hiérarchie en changeant les noms de pays, de villes, de “races”, d’intelocuteurs », mais c’est finalement, « un décryptage à la portée de toute personne qui connaît tant soit peu l’histoire et la géographie du Rwanda ».

• « (...) on sait que la DGSE a toujours soutenu que l’avion du président Habyarimana avait été abattu par les extrémistes hutu, à la différence de la Direction du renseignement militaire (DRM), dont l’un des agents était l’époustouflant capitaine Paul Barril. »

• « La “colère populaire spontanée”, thème récurrent des négationnistes, il n’y croit pas, bien au contraire : “La simultanéité, la violence et l’ampleur des massacres attestent de leur planification de longue date”. »

• « Il discerne la structure criminelle : “Généralement les autorités locales, parfois sous la pression de hiérarchies parallèles, prétextent la mise en sécurité des Aras [Tutsi] pour les regrouper dans des lieux publics comme les stades, les bâtiments communaux, les écoles et les églises. Ensuite, des groupes de miliciens achèvent les personnes, parfois précédés par les F.A.Z [FAR] qui commencent le “travail” avec des armements adaptés, des grenades, notamment”. »

Au final, selon Jean-François Dupaquier, « Une vie dans l’ombre” est le livre touchant et vrai d’un homme déchiré par le caractère absurde de ses missions, qui espère trouver ici une forme de rédemption. »

•• Lire l’article de Jean-François Dupaquier sur le site Afrikarabia